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Sur le site Internet « Services aux citoyens » « Contribution et aide financières » « Contribution financière-Adultes hébergés », on peut voir les modalités de ce programme. Le programme de contribution financière des adultes hébergés ne pose aucun problème pour les personnes qui disposent d’un revenu personnel mensuel de plus de 1493,40$ par mois. Le programme est acceptable pour les personnes à faible revenu qui ont un patrimoine inférieur à 2500$. Le fait qu’il soit accordé à ces personnes une somme de 171$ par mois pour leurs dépenses personnelles paraît approprié. C’est pour les familles à faible revenu mais qui disposent de certains biens et économies que le programme de contribution des adultes hébergés pose problème. Pour ces personnes, les règles de contribution des adultes hébergées peuvent être sources d’injustice, de violence, de négligences et d’imprudences. Si nous considérons les autres programmes gouvernementaux qu’utilisent régulièrement les personnes à faible revenu nous voyons que : · Le supplément de revenu garanti est basé sur le revenu annuel, · Le programme d’exonération financière pour les services d’aide domestique dépend lui aussi du revenu, · Le programme de logements à loyer modique (HLM) est basé sur le revenu du ménage pour l’année civile précédant la signature du bail, · Le programme Allocation-logement est basé sur le revenu. Toutefois en sont exclus les ménages qui ont des biens ou des liquidités dont la valeur dépasse 50 000$ (excluant la valeur de la résidence, du terrain, des meubles et de la voiture). Le programme de contribution des adultes hébergés de la RAMQ tient compte de : · tous les revenus familiaux, incluant les allocations familiales, · tous les biens familiaux, (incluant la résidence et la voiture familiale) dépassant 1500$, · toutes les économies familiales (incluant les régimes enregistrés d’épargne études prévus pour les études des enfants) dépassant 2500$. C’est toute une différence, n’est-ce pas, avec les programmes habituellement utilisés par les personnes à faible revenu. En fait, les règles de contribution des adultes hébergés sont basées sur les règles de l’aide sociale selon les normes du 1 juillet 1983 (article 369 du Règlement d’application). Si on recule un peu dans le temps, on apprend que jusqu’en 1975, il n’en coûtait rien au citoyen pour vivre dans un établissement public de soins de longue durée. À cette période, les mentalités sont que dès qu’une personne craint de perdre son autonomie, elle songe à se « placer » et le gouvernement héberge tous ceux qui désirent vivre en institution. Ainsi, des personnes qui avaient amplement le choix de vivre dans leur milieu naturel se sont retrouvées institutionnalisées. On peut comprendre, dans un tel contexte, que le gouvernement de l’époque ait agi en édictant un règlement semblable à celui de l’aide sociale. Ainsi, la personne qui veut vivre en institution choisit d’y laisser son patrimoine. Les familles qui veulent placer un de leurs membres, alors qu’il serait facile de le garder à la maison choisissent de laisser le patrimoine familial à l’institution. Or la situation a changé depuis 1975, les personnes institutionnalisées sont uniquement des cas très lourds. En même temps, les services à domicile se sont développés et des personnes avec de grandes limitations vivent chez elles, soutenues par leurs proches qu’on appelle les aidants naturels. Aller vivre en institution publique n’est plus un choix, c’est une nécessité et les personnes qui vivent dans un CHSLD ne peuvent pas choisir d’aller vivre ailleurs. Par quelle logique la contribution d’un adulte hébergé est-elle encore calculée selon les conditions sociales de 1975? Dans le dépliant et dans le manuel d’interprétation du Programme de contribution des adultes hébergés, il est dit que « la contribution des adultes à leur hébergement répond à un souci d’équité envers la société… C’est évidemment le ministère de la Santé et des Services sociaux qui assume la majeure partie des coûts d’hébergement, et la contribution exigée du bénéficiaire équivaut à peu près à ce qu’il lui en coûterait pour demeurer dans son foyer » (Code 1.512). Comment exiger 1493,40$ par mois et affirmer que c’est « ce qu’il lui en coûterait pour vivre dans son foyer » alors que le revenu de pension de vieillesse incluant le maximum du supplément de revenu garanti est actuellement de 1036,58$ par mois? Comment au nom de « l’équité envers la société» exiger 1493,40$ par mois pour la personne hébergée et, dans le calcul de la contribution, n’accorder qu’une déduction mensuelle de base de 962,00$ par mois pour le conjoint non hébergé. Comment peut s’expliquer cette différence mensuelle de plus de 500,00$? Comment peut-on parler de « souci d’équité envers la société»? La personne vivant à domicile peut choisir de partager son logement avec une autre personne si cela lui apparaît souhaitable économiquement. Pour la personne hébergée, le règlement d’application dit que « l’attribution du type de chambre, privée, semi-privée ou salle…est une décision dont la responsabilité revient essentiellement à l’établissement » et « la contribution mensuelle sera toujours fixée en fonction du type de chambre occupée par l’usager et non en fonction des choix qu’il a pu exprimer » (code 1.13). Actuellement, toutes les nouvelles constructions de CHSLD ne comportent que des chambres privées et lorsqu’il y a des rénovations dans de vieux immeubles, on convertit des salles en chambres privées. Ce système implacable empêche des fins de vie sereines. Ce fut le cas de Claude dernièrement. Claude vivait avec Anne. Tous deux étaient retraités et leurs revenus étaient constitués uniquement de prestations gouvernementales. Claude a dû être hospitalisé. Un cancer a été diagnostiqué et son état s’est détérioré. Il est rapidement devenu évident qu’il ne pourrait retourner à la maison. Après 45 jours d’hospitalisation, une facture a été émise sur la base de 1493,40$ par mois. Comme Claude était propriétaire d’une maison, il n’avait droit à aucune exonération. Claude était très inquiet. Il passait beaucoup de temps à calculer combien il en coûtait à Anne, à même ses prestations à elle, pour payer son hébergement à lui. Il était très conscient que plus il vivrait longtemps, plus Anne serait pauvre et même très pauvre. Il est mort dans les tourments générés par la culpabilité de n’être pas mort plus tôt. Ce système implacable met des citoyens devant des choix absurdes et déchirants. C’est le cas d’Isabelle et Stéphane, un couple marié, parents d’enfants mineurs. Isabelle est atteinte d’une maladie dégénérative non mortelle mais qui la conduira à l’institution dans les mois ou les années à venir. Stéphane trouve injuste que tout le temps que sa femme vivra en CHSLD, il lui sera facturé 1493,40$ par mois alors que s’il vivait avec Isabelle en union libre (comme c’est le cas d’une forte proportion de citoyens de son âge) il ne serait pas mis financièrement à contribution. Il songe à divorcer d’avec Isabelle qu’il aime pourtant profondément pour ne pas que ses enfants et lui-même soient acculés à la pauvreté pour de nombreuses années. Il sait qu’une procédure de divorce affecterait grandement Isabelle qui est déjà fragilisée par la maladie. Stéphane se sent totalement coincé. Ce système implacable ne tient aucunement compte des solidarités familiales. Cela peut mener à des situations violentes pour des personnes très vulnérables. Roland a plus de 90 ans, il vit dans sa maison dont il est propriétaire et possède quelques milliers de dollars. Sa fille Réjeanne (autour de 70 ans) vit avec lui depuis de nombreuses années et lui apporte le soutien dont il a besoin. Réjeanne est secondée par son frère Gilles qui vient régulièrement lui prêter main forte. Le testament de Roland établit que Réjeanne héritera de la maison. Bien que Roland ait plusieurs enfants, son testament précise que son avoir liquide sera divisé entre Gilles et Réjeanne, puisque ce sont eux qui s’occupent de lui. Gilles et Réjeanne apprennent qu’advenant le placement de leur père, le montant demandé par l’établissement dépassera largement les revenus de leur père et que le patrimoine de celui-ci devra servir à payer son hébergement. Ils considèrent cela totalement injuste car depuis de nombreuses années, ce sont eux qui soutiennent leur père de façon très active. Selon Gilles et Réjeanne, il serait inapproprié de demander à leur père de leur céder dès maintenant sa maison et ses économies compte tenu de sa fragilité. Gilles et Réjeanne n’ont pas l’intention de placer Roland qui a toujours souhaité mourir dans sa maison. Sauf que s’ils deviennent incapable de s’en occuper, ils projettent de se « tromper quelque part » pour accélérer sa mort. Irène est en lourde perte d’autonomie. Ses 3 enfants se relaient à son logis pour répondre à ses nombreux besoins. Elle n’a que de faibles revenus mais dispose d’un certain patrimoine. Elle a vécu à l’époque où «cela ne se faisait pas de payer ses enfants», même lorsque ceux-ci doivent perdre des journées de travail rémunéré pour s’occuper de leur mère. Les enfants, compatissants pour leur mère, tolèrent la situation. Ils se disent qu’ils sont les héritiers et qu’à la mort de leur mère, ils toucheront compensation pour les nombreuses journées de travail perdues. Sauf que lorsqu’ils prennent conscience des règles financières régissant les adultes hébergés, ils décident d’insister auprès de leur mère pour qu’elle leur compense les journées de travail perdues. Leur insistance risque de se transformer en violence si Irène résiste. Ce système implacable ne tient aucunement compte des mentalités et des traditions Émile a été longtemps propriétaire d’un petit commerce qu’il avait hérité de son père, qui lui-même l’avait hérité de son père. Le commerce a toujours passé de père en fils, mais uniquement à la mort du père et « jamais avant ». Le commerce a fermé il y quelques années. L’édifice a été vendu et Émile a investi le produit de la vente à son nom. À sa mort, ses enfants qui ont travaillé très fort dans le commerce sans jamais avoir été payé un salaire juste hériteront de cet argent. Lorsqu’Émile apprend qu’advenant une lourde perte d’autonomie, le produit de la vente du commerce devra servir à payer son hébergement, il ne peut « prendre ça ». Il se dit que ses enfants ont travaillé tellement fort dans ce magasin, que l’argent leur revient. Pour lui il est inconcevable de donner maintenant à ses enfants le produit de la vente du magasin car ce serait comme « se déclarer déjà mort ». Il décide d’accumuler certains médicaments qui lui sont prescrits et projette de les prendre « toute d’une shot » s’il venait à ne plus avoir la force de vivre dans son logis. Hélène et Jacinthe ont passé leur jeunesse « éreintées sur des machines à coudre commerciales » installées dans la maison de leurs parents où elles remplissaient des contrats pour des manufactures. Leurs parents ne les ont jamais payées pour le travail qu’elles faisaient, l’argent était déposé au nom de leurs parents et ceux-ci leur ont toujours dit que quand ils mourraient elles hériteraient de cet argent. Leur mère est morte il y a quelques années et leur père éprouve plusieurs problèmes de santé. Lorsque Jacinthe et Hélène apprennent les règles de contribution des adultes hébergés, elles vont rencontrer leur père pour lui demander de leur remettre « l’argent qu’elle ont gagné avec les contrats de manufacture ». Le père ne veut rien entendre. Elles lui expliquent qu’advenant qu’il soit hébergé l’argent devra être utilisé pour payer l’établissement. Il leur promet qu’il n’acceptera jamais d’être placé surtout si le « gouvernement est pour le ‘pleumer’ de son argent ». Jacinthe et Hélène « brassent la cage » pour que leur père leur cède cet argent car elles considèrent qu’il y a de fortes probabilités que leur père devra être hébergé en soins de longue durée un jour ou l’autre… La violence s’installe. Ce système implacable conduit à des manques élémentaires de prudence Gérard et Rita sont arrivés à leur retraite à 65 ans sans aucun patrimoine. Ils constatent que leurs revenus de prestations gouvernementales leur suffisent pour vivre mais lorsque l’un des deux sera décédé, il sera beaucoup plus difficile pour l’autre de tenir le coup avec la moitié des revenus compte tenu des dépenses fixes pour maintenir le loyer. Ils décident donc, à partir de 65 ans de mettre 100$ par mois « de côté » pour protéger le conjoint qui survivra. Ils ont maintenant autour de 80 ans et ont toujours persévéré à « ménager » 100$ par mois. Rita est encore en bonne santé, mais pas Gérard. Dans son cas à lui, un hébergement en soins de longue durée devra être envisagé dans un avenir plus ou moins rapproché. Lorsqu’ils apprennent que le « magot » patiemment amassé pour protéger « celui des deux qui mourra le dernier » devra servir à payer l’hébergement de Gérard, ils sont anéantis. Rita va chercher l’argent à la banque et le camoufle dans leur logement. La table est mise pour la violence si Rita confie son secret à une voisine qui a un fils un peu délinquant. Le gouvernement du Québec investit dans le Centre québécois de consultation sur l’abus envers les aînés (ligne Info-abus aînés) qui est « un service téléphonique d’écoute, de soutien et d’information offrant de l’aide aux individus confrontés à des situations d’abus ». Pour diminuer la violence envers les aînés, c’est sûrement une bonne initiative que cette ligne Info-abus aînés. Ce serait également une bonne initiative que de modifier le programme de contribution des adultes hébergés qui est lui-même source de violence, de négligence et d’abus. De nombreux citoyens à faible revenu ignorent les règles financières régissant les adultes hébergés. Ils croient, qu’advenant un hébergement en CHSLD, ils seraient régis par des règles similaires aux programmes qu’ils utilisent déjà : supplément du revenu garanti, allocation logement, programme de logements à loyer modique, programme d’exonération financière pour services domestiques. Les organismes communautaires, tels les regroupements de retraités, hésitent à informer leurs membres du programme de contribution financière des adultes hébergés, car ils craignent que l’information puisse avoir un effet pervers. Lorsque l’information concernant un programme gouvernemental peut avoir un effet pervers, n’est-ce pas plutôt le programme lui-même qui est pervers? Pistes de solution : Il en coûte en moyenne 5100$ par mois au gouvernement pour l’hébergement d’une personne en CHSLD. Actuellement, une personne dont les revenus sont de 5000$ par mois paie 1493,40$ par mois pour vivre dans un CHSLD. Le gouvernement subventionne cette personne aux revenus élevés pour 5100,00$-1493,40$= 3606,60$ chaque mois. De plus, les montants versés dans un CHSLD sont déductibles à titre de frais médicaux pour le calcul de l’impôt sur le revenu. Cette personne aux revenus très élevés est donc largement soutenue par le gouvernement. Une personne dont les revenus sont de 1100$ par mois mais qui possède une maison même modeste occupée par un conjoint paiera beaucoup plus que ses revenus pour vivre dans un CHSLD, mettant en grande difficulté le conjoint non hébergé. Ne serait-il pas plus équitable de demander un montant qui s’approche du coût réel (5100$) à celui qui a des revenus élevés, plutôt que de 'tordre' celui qui a peu ??? Jeannette Lisée 259 rue Michel, St-Joseph-du-Lac, Qué J0N 1M0 Tél : 450-623-0814ou 623-0815 jeannette_lisee@hotmail.com |
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